Page 2 : Le combat d'Ermeton-sur-Biert, suite

Le combat d’Ermeton-sur-Biert suivant les récits des soldats allemands 


Suite de l’historique du 1er régiment de la garde à pied lors de la bataille de Saint Gérard :

Enfin apparut l’aube du 24 août 1914 :
Exceptionnellement,  ce fut le 3e Régiment de gardes à pied qui marchait en avant de la division.
La marche du premier régiment fut plus lente et nous sommes arrivés à midi à la gare d’Ermeton, dans un vallon entre Ermeton et Biesmerée. 

Le chef du 1e bataillon fut informé par le lieutenant des uhlans que de l’autre côté d’Ermeton, d’importantes colonnes de soldats belges se repliaientmais que le centre du village était libre.
Le Comte Eulenburg signala que chaque minute qui passait était tout bénéfice pour l’ennemi et qu’il fallait intervenir le plus rapidement possible pour stopper leur retraite.
Il ordonna au 1er bataillon de la 1ere compagnie de passer en avant. Lorsque le Lt. comte
 Hardenberg s’approcha du centre du village, il fut accueilli par une vive fusillade. Contre toute attente, le centre du village était occupé par les soldats belges.

 

La mort du sous-lieutenant Hans Sigismund von OPPEN :
H-S. von Oppen, prit un fusil sur l’épaule et entra dans le village sur son cheval lancé au galop. Trop téméraire, il reçut une blessure mortelle. Il est mort pendant la nuit dans un hôpital de campagne dans les bras de son commandant de régiment et ami, le premier officier du régiment, le comte Eulenburg.

La Leibkompanie (1e compagnie) va se déployer face à la sortie ouest d’Ermeton et la 3e  compagnie va se poster dans le sud du village en position de défense sur la crête. Ce sont les 2e et 4e compagnies qui pénètrent dans le village par le sud. Elles font la jonction au niveau de l’église où arrive aussi la 1e compagnie par l’ouest.
Il s’ensuit ensuite une véritable guérilla urbaine dans toutes les rues du village, plus particulièrement autour de l'église : les Belges étaient bien retranchés dans chaque maison, même sous le toit et dans la tour de l'église. Finalement, nous n’eûmes pas d'autre choix pour bouter les Belges hors des habitations que de bouter le feu aux maisons. 
Les Grenadiers de Talis Semper se sentant attaqués lâchement, avaient une rage irrépressible et ne montraient plus aucune pitié. 
Enfin, le village fut nettoyé à fond et nos soldats en furent maîtres. Néanmoins, la chaleur dégagée par les incendies était si intense qu’il était impossible de rester dans le village.

Récit de Karl Willnitz lors de la bataille d’Ermeton :
« Le lendemain  matin (24) Avec les premiers rayons du soleil, nous apercevons jusqu’à l’horizon nos troupes qui avancent vallon par vallon. C’est un spectacle magnifique. A 14H00, nous n’avons toujours pas de contact avec l’ennemi.  Dissimulés avec quelques camarades, nous observons le village d’Ermeton et plus en arrière une forêt à environ 4 kilomètres. Il semble y avoir de l’activité dans le bois. 

Oppen Hans-Siegismund un officier très apprécié rampe vers nous et nous demande :
- Qu'est-ce que vous observez mes amis ? Voyez-vous de l’activité ?  
- Oui  monsieur, il semble qu’il y ait de l’artillerie  et nous voyons que des tranchées sont creusées à droite.
- Quoi, les salopards !  
Il ordone à un soldat " apportez moi mon cheval ! Et un fusil en bandoulière, le voilà parti au galop sur Ermeton faire une reconnaissance. Il ne savait pas que le village était occupé par des soldats belges embusqués et des francs-tireurs. Il revient un peu plus tard, mais avec une blessure grave. Il nous avertit que l’artillerie se trouve dans le bois opposé. Malheureusement,  il décédera quelques heures plus tard. Cet officier était très apprécié et toujours de bonne humeur : « Oppen »  comme nous l'appelions à cause de sa gaieté constante.
L’artillerie et les troupes belges furent rapidement cernées. Rien n’échappa aux représailles.
Nous jetons dans la bataille de plus en plus de troupes sur Ermeton.
Il s'agit d'une bataille dans laquelle la population civile avait effectivement participé. Dans chaque cachette se dissimulaient un fusil, une mitrailleuse. Nous ne pouvions avancer qu’en incendiant maison par maison. La lutte fut particulièrement intense, les soldats belges ne s’échappant qu’au dernier moment en sautant par les fenêtres le fusil à la main.
Comme nous avancions vers l’église, nous aperçûmes que l’ennemi avait installé une mitrailleuse sur la tour du clocher.
Un soldat de la 9e compagnie de Füsiliers : Pelzer, a vraiment un comportement de bravoure exceptionnel, alors que nous devons nous abriter dans un coin de rue suite à des traîtres coups de feu,  il s’avance au beau milieu de tous ces tirs et tranquillement fait feu comme à la foire. Nous pensons tous qu’il a perdu la tête et qu’il va se faire certainement abattre ; autour de lui les balles ricochent et crépitent, mais comme s’il était invisible aucune balle ne l’atteint  et le Bavarois continue de tirer ainsi toutes ses cartouches. A bout de munitions, il nous rejoint en disant « saloperie de m… mon fusil n’a plus rien à bouffer ! » Il prend toute une poignée de cartouches d’un blessé et veut repartir, mais nous l’en empêchons et l’obligeons à attendre avec nous pour repasser à l’offensive.
Depuis longtemps, nos camarades ont pénétré à droite et à gauche du village par les jardins.
En criant un « hourra » Nous repartons à l’assaut en prenant l’ennemi au dépourvu.
En de nombreux endroits, l’ennemi doit-être chassé à la baïonnette. Les soldats belges prisonniers nous racontèrent plus tard que cette charge à la baïonnette les avait beaucoup impressionnés.
Dans la soirée, toute la place est en notre possession ... enfin presque, car la chaleur des incendies qui se propagent est tellement intense qu’il est impossible de rester dans les alentours du village et nous devons nous éloigner quelques endroits plus loin, vers Biesmerée. Nous bivouaquons dans une dépression près d’une bifurcation du chemin, en Y ; là, apparemment de nombreuses marchandises en vrac partent d’Ermeton vers différentes directions.
Bientôt, nous tombons dans un profond sommeil. Un sommeil qui nous fait oublier cette coûteuse victoire, en effet aujourd’hui nous avons dû essuyer de lourdes pertes pour un succès très limité.
Le premier régiment de la Garde à pied a beaucoup souffert lors du combat pour la prise d’Ermeton ce 24 août 1914 et a perdu de nombreux officiers. Ceux-ci étaient reconnaissables grâce aux grandes pointes de leurs casques ; plus tard ces pointes diminuèrent de plus en plus. 
Avec tous ces morts, la victoire semblait amère nous n’étions pas à la fête, mais avions plutôt un sentiment d’amertume et aussi de rage à cause des fourberies de l’ennemi.
Notre victoire de Saint- Gérard-Ermeton est plus grande que nous l’avons cru, car le 25 et le 26 l’ennemi était en pleine déroute et fuyait. 
De nouveau dans cette poursuite, l’ennemi avait abandonné une multitude d’équipement, tout le matériel abandonné était saboté, même les chevaux ne sachant plus suivre la retraite étaient abattus. 
Le 25 à 6 heures du matin, nous recevions l’ordre de continuer la marche. La division se regroupa et on partit. Le 26 août à 20H30, nous franchîmes la frontière française par un temps sombre et un ciel couvert. Le « Deutcheland über alles » résonnait dans la nuit tranquille, entonné par toutes les voix allemandes.

Le 1er régiment de la Garde Impériale à pied "zu Fuss" devant le château de Villermont à Ermeton-su-Biert Grenadier de la garde

 

Arrivé en France quelques jours plus tard, un officier de la Garde dira lors de cette poursuite :

« Mon régiment est parti avec soixante officiers ; il n’en compte plus que cinq. Plus de 2000 hommes sont hors de combat. Mon régiment n’est plus qu’un débris ; nous traversons des épreuves terribles ».

 

Si les soldats du corps de la garde ont souffert  durant les combats dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, leurs frères d’arme du Xe corps ne sont pas plus chanceux :

A cette date un soldat écrit 

« Depuis le début de la campagne, presque tous nos chevaux sont tombés. Nous  nous battons tous les jours de 5 heures du matin à 8h00 au soir, sans manger ni boire. Le tir de l’artillerie française est effroyable. Le Xe corps et la garde ont été particulièrement éprouvés. Nous ne recevons plus aucun courrier, les automobiles postales du Xe corps ayant été détruites »  

 

Le soir du 24 à Ermeton, un soldat allemand a tué par méprise un autre allemand qui était dans un prunier et qu’il prenait sans doute dans l’obscurité pour un soldat belge.
Lettre du père Eucher :

« Adelin Thibaut à enterré le soldat tué et conservé son casque et ses épaulettes que j’ai vus.
Les épaulettes portent le chiffre 103 et le casque un insigne aux armes de Saxe ».
Ce témoignage précis nous fait découvrir que le soir, les troupes de la 3e armée saxonne avaient fait leur jonction à Ermeton avec les troupes de la 2e armée.

Soldats saxons du 103e régiment De nombreux combattants belges tués à Ermeton reposent au cimetière de Marchovolette

 

Mort du Capitaine Tilot et du Lieutenant Denis


Voici un témoignage émouvant du courage, puis de l’agonie du capitaine-commandant Tilot. 
Cette scène décrit l’affliction d’un soldat belge soignant son capitaine gravement blessé, qui agonise dans d’atroces souffrances : C’est le portrait de 2 malheureux soldats belges, qui ayant rempli leur devoir patriotique se retrouvent fragiles impuissants au sein d’un conflit d’une violence extrême : la guerre moderne !
Dans ce récit poignant, c’est aussi toute la souffrance qu’endurèrent ces milliers de blessés lors des combats dans notre région, qui est dépeinte dans toute son horreur.

Nestor Finet sergent-major au 13e de ligne :

« A ma rentrée de captivité, je considère comme un devoir  de rappeler la mort héroïque de MM le capitaine-commandant Tilot et du lieutenant Denis, du 13e régiment de ligne. Tous deux tombèrent au champ d’honneur dans les combats d’Ermeton-sur-Biert, le 24 août 1914 : le premier, blessé mortellement mourut quelques jours plus tard, le second fut tué sur le coup. 
Notre bataillon, le IIIe du 13e régiment de ligne avait quitté les tranchées de Géronsart (Jambes), le dimanche 23 août à 18H00. Je passe rapidement cette malheureuse et pénible retraite qui, quoique notre détachement eût à essuyer à plusieurs reprises des coups de feu, nous amena par Bois-de-Villers et Bioul devant Ermeton où nous tombâmes dans une embuscade. 
Les Allemands guettaient, selon leurs dires, l’avance de notre colonne depuis plus de quatre kilomètres. 
Attaqué de tous les côté à la fois, la plus grande partie de la colonne gagna le village ; l’autre d’un effectif d’environ 20 hommes dont je faisais partie, prit position sous le commandement du capitaine-commandant Tilot, derrière un talus naturel à environ 200 mètres de la route. 
Nous défendions ainsi l’entrée du village. Le commandant revint avec 3 hommes et moi à l’emplacement que nous avions quitté auparavant. Le lieutenant Denis et deux hommes de sa compagnie (les soldats Louis Denis et Louvigny) s’étaient joints à nous sur ces entrefaites. 
Nous occupâmes ainsi un côté de la route. Les Allemands se trouvant de l’autre côté. 
Malgré leur supériorité numérique, le commandant Tilot leur opposa une vive résistance. C’est alors qu’il tomba victime du devoir, atteint par une balle à la joue droite. Cette balle, après lui avoir fracassé la mâchoire et enlevé la langue, alla égratigner à la main du soldat Maquet.
A son tour, le lieutenant Denis fut atteint à la tête par une balle qui l’étendit raide mort.
Le commandant Tilot garda cependant sa présence d’esprit. Jugeant avec raison d’ailleurs, qu’il n’était plus possible de soutenir plus longtemps la lutte, il passa son propre mouchoir au soldat Louvigny qui le hissa au bout de son fusil en signe de reddition. Notre petit groupe fut ainsi fait prisonnier après un combat acharné de plus de deux heures. Les cartouches étaient brûlées.
J’eus l’autorisation de l’officier allemand de rester auprès de mon commandant afin de lui procurer les soins urgents que réclamait sa blessure. Un brancardier belge, prisonnier aussi et que j’avais fait demander, le pansa. Nous voulûmes alors emmener le commandant avec nous, chose qui fut rendue impossible tant par le mauvais vouloir des « boches » que par les souffrances terribles causées à l’officier par sa blessure. En effet, mon brave et malheureux chef pouvait à peine se soutenir. Déjà la joue enflait et bleuissait. La chaleur l’accablait. Le corps du vaillant lieutenant Denis était devenu noir.
Le brancardier ayant reçu l’ordre de s’éloigner, je restais seul auprès du commandant.
Souvent je renouvelais les pansements, vu la perte énorme de sang. Cela m’obligea à employer plusieurs sachets de pansement, mon mouchoir de poche et des essuie-mains du commandant. Je voulus alors utiliser le linge de mon sac pour continuer les pansements, mais je ne le pus, les sentinelles allemandes refusaient de me laisser aller reprendre mon sac resté attaché aux fils de fer lors du changement de position. 
De temps en temps, pour étancher la soif du commandant produite tant par la fièvre que par la chaleur, je lui versais à boire dans la bouche : il n’avalait que très peu et très difficilement. 
A mon tour je fus forcé de partir. Dépeindre ma tristesse lorsque je dus le laisser seul, sans une main amie pour le secourir serait chose difficile. Je me rassurai cependant quelque peu lorsque, sur ma demande, il me fut répondu qu’une voiture de la Croix-Rouge ne tarderait pas à venir le chercher. Je partis donc le cœur gros après qu’il m’eut serré la main une dernière fois. Comme il me l’étreignit cette main ! La parole soudain me fit défaut et je ne pus m’empêcher de pleurer. Hélas, il pressentait déjà sa fin prochaine et que plus jamais il ne me reverrait. En effet, j’appris quelques mois plus tard qu’il était décédé à Maredsous ».

Capitaine Tilot, 13e de ligne, mortellement blessé à Ermeton-sur-Biert Lieutenant Denis, 13e de ligne tué à Ermeton-sur-Biert

Cimetière de Maison/Libenne

Tombe d'un lieutenant du 13e régt de ligne

La présence de nombreux soldats du 13e de ligne s'explique par le fait que ce régiment était caserné à Namur.

Charles Lurkin de Devant-les-Bois (debout, 2e à gauche) du 13e de ligne à Namur, quelques mois avant la guerre.

 

Aimable Leduc, soldat du 13e de ligne tué dans les Biert

Cliquez sur l'image pour découvrir sa "fiche personnage"

Paul Tocquin né à Ermeton 1893-1955, soldat au 13e de ligne en 1914

Inhumations et exhumations des soldats belges:

Durant la guerre les corps des victimes militaires belges furent exhumés des fosses où ils reposaient ça et là dans la localité pour être rassemblés dans le cimetière d'Ermeton-sur-Biert. Plus tard les corps furent de nouveaux exhumés pour être enterré au cimetière de Marchovelette. Pour les corps identifiés, certains furent réclamés par les familles. 

Comtesse Marie de Villermont récit manuscrit, concernant les exactions commises à Ermeton par les Allemands :

« Ils ont du reste brûlé beaucoup de leurs morts dans les maisons. Peut-on espérer que les corps qu’ils ont jetés avaient perdu toute vie. Le combat n’était pas fini que l’on commença à mettre le feu dans le village. 
Comme presque tous les habitants étaient partis, ils n’ont pas trouvé beaucoup de monde à tuer. Leurs victimes sont Léopold Dethy, brave homme, très bon, qui se trouvait dans sa maison, les Allemands se sont saisis de lui et l’ont fait sortir dans la rue à coups de crosse. Ils le firent courir devant eux en le lardant de coups de baïonnette jusqu’au moulin Lagnier. Là,  ils l’achevèrent cruellement. 
Les deux gardes du château : Jean Baptiste Vanderels et Henri Bodart, attendaient ensemble la fin de la bataille dans la maison de ce dernier. Les Allemands sont entrés, les ont poussés dehors et les ont fusillés. Ils sont tombés, on les a sans doute crus morts car on les a laissés là. La femme de Jean-Baptiste et ses enfants sont allés le relever et le conduire au château. Henri alla se cacher dans le ruisseau sous un buisson et a put le soir se traîner au château. Tous deux avaient la poitrine perforée par les balles. Nous avons pu les soigner et les guérir.

Cinq minutes avant le combat, les Allemands ayant aperçu une famille de fuyards ont tiré dessus, tuant deux hommes et blessant une femme que l’on nous a amenée.

Grâce à ma sœur Jeanne, on a épargné quelques maisons du village. Quand elle a vu que le lendemain on recommençait les incendies, elle obtint des Allemands que l’on arrête les exactions. Les rares habitants rentrés dans le village pendant tous ces événement m’ont certifié que les soldats jetaient des grenades incendiaires, chantaient, dansaient, jouaient du fifre et du tambour, bref se livraient à des démonstrations bruyantes de joie, ce qui se fit aussi à Surice, ainsi que l’ont affirmé des habitants d’Ermeton qui se trouvaient dans ce dernier village lors du massacre. 
Il y eu à Ermeton 86 maisons brûlées. 

Edmond Tocquin, marchand de charbon, s’était réfugié dans le château pendant la bataille, il fut sommé par les Allemands d’aller ramasser les morts, puis tout à coup un groupe d’uhlans qui s’engageaient sur la route de St Gérard le prirent et le firent marcher devant eux parce qu’ils avaient aperçu en haut de la montée, un petit groupe de Belges. On fit monter cet homme en courant et en le poussant s’il ralentissait, il est enfin tombé épuisé et on l’a laissé presqu’évanoui.
Je pense que si les cruautés allemandes ont été moindre à Ermeton qu’a Surice, à Spontin et ailleurs, c’est que nous avons eu la chance d’avoir affaire à la garde impériale, régiment commandé par les officiers de la haute aristocratie et sans doute moins brutaux que les autres. L’un des fils de l’Empereur de Prusse Eitel, qui se trouvait là avec le colonel d’Eulenbourg, tous deux ne passent pas pour des hommes cruels. Si nous avions eu les régiments qui sont passés à Dinant, il y aurait plus de massacres. 
Evénements de Surice :
Mais les habitants qui se sont sauvés d’Ermeton n’ont pas été aussi heureux : beaucoup n’avaient pu aller plus loin que Surice. 
A la vue des Allemands, la plupart d’entre eux s’étaient réfugiés dans une grange. Il y avait là Ernest Licot et sa femme Martine Dardenne, la famille Descamps, la famille Genard, composée du père, de la mère, du fils et de sa jeune femme qui était enceinte. Tout à coup, la porte de la grange s’ouvrit et un soldat allemand parut. La nuit tombait, le soldat promena lentement la lumière de sa petite lanterne, puis fit le tour de la grange en arrosant la paille avec un bidon de pétrole qu’il portait. Quand il eut fini, il darda encore sa petite lumière sur le groupe terrifié et bien lentement fit craquer une allumette, mit le feu à la paille et sortit en fermant la porte à clef. Les pauvres gens furent à l’instant entourés de flammes. Affolés ils se mirent à tâter tous les murs pour trouver une sortie. Les Licot, Dardenne et Descamps trouvèrent  une sortie au fond de la grange qui donnait sur un jardin et s’y réfugièrent, mais les quatre Genard ayant trouvé une porte qui donnait sur la maison voisine s’y précipitèrent. La maison était en feu. Le corridor où ils se trouvaient était plein de fumée, mais la jeune femme à demi-asphyxiée, courut  jusqu’au seuil s’ouvrant sur la rue ; des soldats aussitôt la fusillèrent. Son mari qui s’était élancé pour la retenir eut le même sort et les deux vieux parents désespérés s’élancèrent vers leurs enfants et furent aussitôt abattus. Cette scène fut vue par d’autres gens d’Ermeton qui avaient eu le courage de rentrer dans la cave de la même maison et furent ainsi sauvés. Ceux qui s’étaient réfugiés dans le jardin, se cachèrent dans une cabane en bois. Eux aussi ont entendu les danses, les chants, les cris de joie des bourreaux.
Tel est le résumé de ce qu’ont fait les Allemands à Ermeton et qui est parvenu à ma connaissance. J’ai moi-même interrogé et vu. »

Alexandre Rouyre 27ans d'Ermeton-sur-Biert 

tué à Surice

Juliette Genard, 22 ans, 

épouse d'Alexandre Rouyre  tuée à Surice

Pour l’anecdote, l’électricité est produite à Ermeton par une dynamo : 

« En ce moment on est en train de dire que des soldats sont en train de faire flamber la machine électrique. Jeanne va encore trouver le colonel lui dire que si l’on brûle la dynamo, tout le château sera sans lumière »….

 

Les assassinats à Ermeton des 2 civils de Falisole et de Léopold Dethy :

Lettre du père Eucher de Maredsous :

« Cruautés : Ils tuèrent sur la route de Denée, 2 hommes, François Terwagne de Falisole et Louis Grandjean de Tamines et blessèrent madame Chale, tante de ce dernier.
Ils achevèrent un soldat blessé qui se traînait près de la chapelle saint Roch. 
Ils tuèrent un soldat belge qui s’était caché dans un poulailler de la maison Delforge.
Léopold Dethy fut mené par eux près du moulin de l’Agnelée, entre Ermeton et Biesmerée, lardé de coups de baïonnette, et enfin tué. Il fut retrouvé les mains liées derrière le dos et affreusement mutilé  (selon François Licot sur témoignage de celui qui l’a exhumé par la suite).
François a été mis au mur au moins 3 fois.
Vital Blaimont, jardinier des Villermont, fut tué à coups de sabre au château de Couvin. »

Moulin de l'Agnelée entre Biesmerée et Ermeton.

2e Lettre de la comtesse Marie de Villermont :
 

« Léopold Dethy, né à Ermeton-sur-Biert le 17 septembre 1868, pris au moment où il sortait de sa cave, croyant à une accalmie. 
Il n’a pas été fusillé au moulin Lagnier, mais au moulin de Furnaux à 2 ou 300m de là. Il a été fusillé avec un soldat belge prisonnier. 
Les personnes qui habitaient alors ce moulin sont parties pour la France. Tout ce qu’on a pu m’en dire c’est qu’elles avaient été obligées de rentrer dans leur maison pendant l’exécution »

 

Henry de Villermont  tué  le 5 septembre 1914 lors de la bataille de Zammel à Westerloo 


(Source : P. Hadelin de Moreau, Nos aînés au champ d’honneur. Maredsous)
 

1914 fut certainement l’année la plus épouvantable que la famille de Villermont aura à affronter. 
En juin 1914, la seconde épouse d’Alphonse de Villermont décède. C’est elle qui avait élevé le petit Henri : sa mère étant morte en couches. 
Quelques jours plus tard, la guerre éclate. Souffrant d’une maladie du cœur, Alphonse de Villermont, châtelain d’Ermeton et conseiller à la province, s’agite outre mesure et décède tout à fait subitement. Le service funèbre a lieu le jeudi 06 août, peu de personnes y assistent, chevaux et voitures venant d’être réquisitionnés, les bourgeois sont privé de moyens de transport, de plus la guerre qui vient d’éclater bouleverse les priorités. On y parle plus des événements que du mort. Un moment de grande émotion survient lors de la cérémonie: Un jeune homme, le chef de la jeunesse, après avoir fait l’éloge funèbre, informe l’assemblée que le fils unique du défunt, le comte Henri, s’est engagé comme volontaire et part le lendemain pour rejoindre l’armée belge.

Henry de Villermont  est docteur en droit et a 27 ans, il est engagé au 1er lanciers à Namur. Il exécute des reconnaissances à Temploux, mais est fait prisonnier le 23. 
Une chance pour lui, le voici stationné avec ses compagnons d’infortune sur la place de Bioul. Mais Henri connaît très bien la région : il se retrouve près d’une maison dont il connaît les habitants. Il revêt chez ses hôtes des vêtements de paysan, échappe à ses gardiens, et s’enfuit à travers bois.
Il arrive ainsi aux avant-postes de l’armée belge sous les murs d’Anvers. 
Toujours téméraire, le samedi 5 septembre, il fait partie d’une mission de reconnaissance à grande distance vers l’est. La patrouille organisée par le lieutenant Henckart, est composée de douze hommes répartis dans trois véhicules blindés armés de mitrailleuses. 

Comte Henri Hennequin-de Villermont Place de Bioul en 1915 lors d'une réquisition de chevaux

Le lieutenant Henckart prend place dans la première auto-blindée ainsi que le Comte de Villermont, de Zualart et le maréchal des logis Misson. Le Prince Baudouin de Ligne se trouve dans le deuxième véhicule. 
Parties le matin, les autos blindées filent par la route de Lierre. Vers 10 heures 30, elles se trouvent à l'est de Kessel. 
Au hameau «Het Puut», on leur signale la présence de l'ennemi, vers le sud dans la direction de Westerloo. Suite à cette information, ils foncent jusqu’un carrefour situé près de Zammel. Un paysan leur signale que le hameau n'est pas occupé. Malheureusement après avoir traversé le carrefour, sur la route de Westerloo, le convoi tombe dans une embuscade dressée par les Allemands : une fusillade éclate. La première voiture riposte, mais seulement un court instant. L'ennemi est posté à couvert dans un petit bois bordant la route. 
En quelques instants, le lieutenant Henckart et le conducteur de Zualart gisent au fond de la voiture, frappés tous deux à la tête. Les deux survivants s'élancent vers la deuxième voiture qui arrive à la rescousse. Henri de Villermont est touché d'une balle à la cuisse et d'une autre à la tête qui lui est fatale. 
Le deuxième véhicule est également mis hors de combat, le Prince Baudouin de Ligne gravement blessé. Les survivants sont récupérés par la troisième auto blindée et se replient immédiatement. 
Vers 14 heures, les morts et les blessés sont ramenés à Herentals. Les trois victimes sont drapées des couleurs nationales et exposées dans la maison communale. Quatre jours plus tard, le Prince de Ligne succombe à ses affreuses blessures

Un monument sera élevé à sa gloire dans son village natal d'Ermeton sur Biert.

Ce mémorial commémore une bataille qui se déroula en ce lieu entre les troupes belges et allemandes le 5 Septembre 1914 et dans laquelle cinq soldats belges ont été tués. Leurs noms : Charles Henkart - Prince Baudoin Lamoral Henri de Ligne -Comte Henri Hennequin - de Villermont - Baron Philippe Zualart - Alfred Croisier

Charles Henkart A droite, le sous-lieutenant Charles Henkart dans sa voiture blindée
Monument à Zandberg, là où tomba le Comte de Villermont Souvenir de décès de Henri de Villermont

http://www.bel-memorial.org/cities/antwerpen/westerlo/zandberg_herdenkin...

 

 
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